# Économie

Consignes : et si c’était l’heure du grand retour ? 

Publié le 20 février 2023 à 23h00

Laitier remplaçant les bouteilles consignées chez un particulier
Laitier remplaçant les bouteilles consignées chez un particulier

Les consignes en magasin, la bonne solution pour lutter contre le gaspillage ? Délaissé à la fin du siècle dernier, ce dispositif permettant de rapporter ces contenants usagers revient peu à peu dans les mœurs.

On vous parle d’un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître : en France en ce temps-là, tout le monde rapportait ses bouteilles en verre en magasin - même Charles Aznavour. Mais depuis la fin des années 1980, avec la multiplication de l’usage du plastique jetable, le réemploi de bouteilles a été complètement délaissé. Et si c’était l’heure du retour triomphal des consignes en magasin, à Montmartre comme ailleurs ? 

Quand la consigne était normale 

La consigne, c’est quoi ? Il s’agit de faire payer en boutique une petite somme supplémentaire au consommateur en échange d’un contenant (souvent en verre) réutilisable. En rendant son contenant, le client récupère la somme. Le but : faciliter le réemploi et limiter les coûts induits par le recyclage. 

Simple, non ? C’est bien ce que devaient se dire nos grand-parents et arrière grand-parents, qui avaient pour habitude d’utiliser les consignes. En France, en 1938, une loi l’a même rendue obligatoire pour les brasseries et les entreprises d’eau gazeuse. On venait chez le commerçant ou au marché avec ses bocaux, sa bouteille pour le lait (ou le vin) ou encore un petit récipient pour les fruits et légumes. 

Le prêt d’un contenant contre quelques centimes aurait plus de deux siècles. L’entreprise irlandaise A & R Thwaites & Co, qui se targue d’avoir inventé l’eau gazeuse, aurait selon différentes sources institutionnalisé pour la première fois la consigne en verre dès 1799 ! Elle payait alors deux schillings pour chaque douzaine de bouteilles rapportées. D’autres entreprises et pays suivirent : la Suède, par exemple, avec un système standardisé mis en place dès 1884. On peut également citer Coca-Cola, qui consigna les bouteilles en verre dès 1929. Bref, un système qui fonctionnait on ne peut mieux, puisqu’une bouteille en verre peut être réutilisée jusqu’à cinquante fois sans passer par la case recyclage. Alors, pourquoi a-t-elle été tristement abandonnée ? 

Et si le réemploi avait de nouveau la cote ? 

Le plastique et l’hyper-consommation durant les trente années suivant l’après-guerre sont les deux principaux coupables. Le principe de pollueur-payeur, lancé au début des années 1990, signa finalement l’arrêt de mort des consignes. Arrêt de mort, vraiment ? 

En France, on peut noter deux exceptions. Au sein des restaurants et cafés, d’abord, où la pratique du renvoi des bouteilles aux producteurs n’a jamais vraiment disparu. Mais du côté des consommateurs, c’est surtout vers l’Alsace qu’il nous faut regarder : la pratique de la consigne existe toujours dans les supermarchés, sans pour autant attirer les foules. C’est en 2019 que trois acteurs bien différents décident de la relancer pour de bon. Les eaux de source Carola et Lisbeth, le brasseur Meteor et l’association Zéro Déchet Strasbourg lancent Alsace Consigne, un réseau local pour diffuser l’usage des consignes en verre en s’associant à la grande et petite distribution. Au-delà de l’aspect écologique, c’est aussi intéressant financièrement pour les consommateurs : une bière Meteor coûte par exemple 20 à 30 % moins cher dans sa version réutilisable que recyclable, affirment Les Echos

Un mouvement à suivre ? La France regarde en effet avec attention ce type d’expérimentations - ou du côté de l’Allemagne, où rapporter ses bouteilles ou canettes vides (y compris en plastique) en supermarché pour recevoir quelques centimes de compensation est devenu un geste banal. 

La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, qui prévoit la fin totale des plastiques à usage unique pour 2040, encourage les collectivités à favoriser les consignes (en verre et plastique) sans imposer de cadre strict. Fin janvier 2023, une concertation a été lancée par le gouvernement avec différents acteurs du secteur pour un éventuel retour des consignes en plastique en France. Une décision devrait être prise à l’été prochain. En parallèle, des entreprises spécialisées ou des associations, à l’image de « Reconcil » ou du « Réseau consigne », cherchent à éduquer sur cette pratique qui, avec l’abandon progressif du plastique, reviendra sans aucun doute dans nos mœurs. 

Auteur : Benjamin B

Crédit Photo : Dragon Images

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