# Culture & Loisirs

Angoûleme : nos coups de coeurs BD du festival 

Publié le 25 janvier 2023 à 23h00

Femme lisant une BD d'aventure
Femme lisant une BD d'aventure

Un demi-siècle, ça se fête ! Le Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême revient cette semaine en grande pompe. La rédaction de L’avenir a du bon vous livre ses coups de cœur de cette édition historique.

 Naphtaline, de Sole Otero 

Couverture de Naphaline
Couverture de Naphaline

Dans une Argentine post-crise, Rocío hérite de l’appartement de sa grand-mère décédée — une femme dont elle n’était pas très proche puisque celle-ci n’était proche de personne. Solitaire et acariâtre, c’est peut-être à cause de ce caractère compliqué que personne ne se présente à son enterrement. En habitant dans la maison de cette femme qui a quitté l’Italie de Mussolini pour venir s’installer en Argentine, Rocío redécouvre l’histoire de sa grand-mère, comme si les murs la lui racontaient. Les non-dits familiaux ne s’éclaircissent pas forcément mais la tendresse refait surface. Au moment de quitter la demeure qui vient d’être vendue, Rocío emporte ce qu’elle peut de ce passé avec elle, à commencer par le chat qui lui a refilé des puces. 

Naphtaline, c’est l’histoire d’une jeune fille qui va à la rencontre de sa grand-mère à travers les objets qu’elle a laissés derrière elle. Très vite, on est embarqué par les couleurs des dessins qui nous font naviguer entre deux subjectivités (Rocio et sa grand-mère) et ce chat plein de puces en fil rouge. La relation entre la petite-fille et sa grand-mère prend une forme différente à l'issue du récit, comme si on n’en avait jamais fini de comprendre les gens dont on partage le nom même une fois qu’ils sont morts. Un récit émouvant.

Naphtaline, 25 euros, chez Ca Et La éditions. 

Je viens de loin mais je repars bientôt, de Enzo Smiths et Ward Zwart

Couverture de "Je viens de Loin mais je repars bientôt"
Couverture de "Je viens de Loin mais je repars bientôt"

L'histoire d'un musicien qui retourne dans sa ville natale où il espérait ne jamais remettre les pieds. Enfin, c’est surtout l’histoire d’un évanouissement et de l’éternel recommencement. Le trait est vert-gris, l’atmosphère est enveloppante. Dans cette bourgade où rien ne se passe, on traîne, on cherche, on rêve de partir ou alors on se fait une raison. Les cases crayonnées laissent se déployer un monde aliénant dans lequel s’entremêlent amitié, musique, et mélancolie tandis que le lecteur se laisse flotter dans ce monde rempli de silence.

Je viens de loin mais je repars bientôt est la deuxième collaboration entre le graphiste Ward Zwart et le scénariste Enzo Smits après Wolven (2016). C’est aussi un plongeon dans une époque révolue, celle où s’ennuyer était possible. Ce roman graphique rappelle Control, le film sur Ian Curtis de Joy Division, mais aussi les errances à la Jim Jarmusch, les années 90s où le skate park était le centre névralgique des échanges des moins de 25 ans. C’est un récit fort, poétique et obsédant. Un vrai coup de cœur pour cette pépite venue de Belgique.

Je viens de loin mais je repars bientôt, 35 euros, chez Même pas Mal

La longue marche des dindes, de Léonie Bischoff

Couverture de "La longue marche des dindes"
Couverture de "La longue marche des dindes"

Simon Green, 15 ans, vit dans le Missouri en 1860 avec son oncle et sa tante. La plupart des gens le prennent pour un simplet, car il vient de quadrupler son CE1. Sa maîtresse bien-aimée, Mlle Rogers, semble être son seul soutien. Lorsque Simon apprend qu'un éleveur de dindes local possède des oiseaux qui pourraient rapporter beaucoup d'argent à Denver, Simon élabore un plan pour acheter les dindes et les emmener à pied sur les 1 000 miles qui le séparent de la grande ville. La route est semée d'embûches, mais pour un brave garçon comme Simon, elle est aussi semée de loyaux compagnons !

Adaptée du roman éponyme de Kathleen Karr par Léonie Bischoff, La longue marche des dindes est une histoire d’aventures passionnante ! Avec un casting de personnages courageux et attachants, on redécouvre le grand ouest américain à travers des paysages fabuleux façon Tom Sawyer. Cependant, l’album parvient à aborder de nombreux thèmes phares de cette époque comme l’esclavage, la pauvreté et la relation avec les Indiens. Une vraie réussite pour l’autrice de la BD Anaïs Nin, qui signe son premier titre jeunesse avec brio !

La longue marche des dindes, 18 euros, chez Rue de Sèvres

Au-dessus de l’Odyssée, de Jason 

Couverture d'"Au dessus de l'Odyssée"
Couverture d'"Au dessus de l'Odyssée"

Au-dessus de l’Odyssée rassemble des histoires, des sketchs, des parodies, des relectures très personnelles à la façon des très classiques recueils de nouvelles. Inclassable mais hilarant, Jason nous livre son dixième livre chez Atrabile truffé de références pop, littéraires et cinématographiques - ses sources d’inspirations privilégiés.

Impossible à résumer, tellement cette BD est hybride et surprenante. On se retrouve à pouffer nerveusement face à des rencontres improbables comme celle de Moise avec Alain Delon. Finalement, on y déambule comme dans une librairie alternative où calme et chaos règnent en parfaite harmonie teinté d’un humour pince sans rire affuté et terriblement à propos.

Au-dessus de l’Odyssée, 24 euros, chez Atrabile

Reckless - Éliminer les monstres, de Ed Brabaker et Sean Phillips

Couverture du tome 3 de Reckless "Éliminer les monstres"
Couverture du tome 3 de Reckless "Éliminer les monstres"

Éliminer les monstres est le troisième tome de la série Reckless qui raconte les péripéties d’Ethan, super anti-héros au passé trouble. Désormais agent spécial indépendant et anonyme, on le retrouve en 1988, en pleine enquête sur un magnat de l'immobilier de Los Angeles. Rien de très difficile en apparence, mais Ethan va vite se rendre compte que tout ce qu’il a de plus cher est en péril. 

Dans une ambiance très cinéma d’aventures eighties, on suit Ethan, l’écorché vif, d’un pas effréné si bien que le lecteur se prend lui-même pour Bruce Willis. Sans compter le côté Cinema Paradiso qui accorde à cet album une dimension touchante et humaine. Ce n’est pas qu’un thriller, mais l’histoire d’un homme qui ferait tout pour protéger ceux qu’il aime. Le tome 3 est haletant et bien ficelé si bien qu’on ne saurait attendre pour lire la suite!

Reckless - Tome 3 : Éliminer les monstres, 16,50 euros, chez Delcourt

La dernière Reine, de Jean-Marc Rochette

Couverture de "La Dernière Reine"
Couverture de "La Dernière Reine"

Défiguré après la guerre de 14-18, Edouard Roux vivote entre peine et rage jusqu’au jour où une artiste de Montmartre, Jeanne Sauvage, lui redonne un visage. Dès lors, Roux découvre l’ébullition artistique parisienne et surtout… l’amour. Se sentant revivre, il décide de faire découvrir à Jeanne la magnificence de son Vercors natal. Grands espaces, vie au grand air et surtout les liens forts qu’Edouard et toute sa famille entretiennent avec les ours, les véritables majestés des lieux.

Véritable plongée dans un récit historique où se chevauchent première guerre mondiale, chasse aux sorcières moyenâgeuse, et le destin du dernier ours du Vercors, Jean-Marc Rochette livre un somptueux roman graphique. Il célèbre le territoire alpin tout en amenant subtilement des problématiques telles que la cohabitation entre l’espèce animale et humaine, écologie, histoire de l’art… Que dis-je plongée, on pourrait le lire en apnée!

La dernière Reine, 30 euros, chez Casterman

Merel, de Clara Lodewick

Merel
Merel

Merel mène une vie paisible. Seule, elle élève ses canards, écrit pour le journal local sur le foot, retrouve ses copains au bar du coin. Bref, le rêve. Seulement, elle a le malheur au cours d’une soirée de faire une mauvaise blague sur le mari de l'une de ses voisines. Tout s’écroule, une rumeur selon laquelle Merel serait une briseuse de ménage se répand dans son petit village et très vite tout le monde se retourne contre elle. C’est mal connaître Merel, qui sous ses airs de bonne copine, ne compte pas se laisser faire. 

Drôle et forte, comment ne pas aimer Merel et son caractère bien trempé. Entre rumeurs, harcèlement et communauté, cet album explore la vie des villages et des liens qu’on oublie parfois si fragiles. 

Merel, 24 euros, Les Ondes Marcinelles - Dupuis

Autrice : Carla P

Crédit Photo : iStock, Même pas mal, ça et là, Delcourt, Rue de Sèvres, Atrabile, Dupuis, Casterman

Partager