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JO 2024 : comment rendre les rivières urbaines baignables à nouveau ? 

Publié le 5 juin 2023 à 22h00

Plongée et baignade dans le canal Saint Martin au XIXème siècle
Plongée et baignade dans le canal Saint Martin au XIXème siècle

La Seine, baignable pour les parisiens après les Jeux Olympiques de 2024 ? On l’espère, mais les efforts à fournir sont encore nombreux. 

Et si l’on pouvait piquer une tête dans la Seine ? « Dans trois ans, j’irai me baigner dans la Seine devant témoins, pour montrer qu’elle est devenue un fleuve propre », promettait déjà Jacques Chirac en 1990, alors qu’il était maire de Paris. Plus de trente ans plus tard, les Jeux Olympiques font resurgir ce vieux rêve : les athlètes pourront-ils se baigner dans le fleuve en 2024 ? Et après les Jeux, les Parisiens eux-mêmes pourront-ils en profiter ? Alors que plusieurs villes du monde se mettent en quête de l’assainissement de leur fleuve, retour sur ce phénomène, ses promesses et limites écologiques. 

En Suisse, on se baigne encore et toujours

Avant d’arriver à Paris, faisons un tour en Suisse : au pays du chocolat, se baigner en eaux vives à quelques mètres de ses bureaux a toujours été normal. Genève, Bâle, Zurich ou Berne, on se baigne partout en Suisse. Mais comment font-ils ? Les Suisses auraient-ils des super pouvoirs leur permettant de barboter dans une eau polluée ? Que nenni : la Suisse a juste des décennies d’avance. 

« En multipliant les mesures d'assainissement, la plupart des cantons a réussi à améliorer la qualité de l'eau ces dernières décennies, jusqu’à la rendre baignable », expliquait la journaliste du quotidien suisse Le Temps Valérie Hoffmeyer en 2020. Depuis les années soixante, la Suisse, au niveau local et national, a multiplié les initiatives pour rendre ses fleuves propres. Selon SwissInfo, alors qu’en 1960, seuls 14% des ménages étaient raccordés à une station d’épuration centrale, ce réseau couvre désormais 97 % des foyers & industries du pays, sur 130 000 kilomètres et avec plus de 800 stations. « La recherche a également beaucoup contribué à la qualité de l'eau (...). Par exemple, des bioréacteurs à membrane, des procédés à lit fluidisé et des réacteurs à biofilm y ont été développés pour purifier l'eau des stations d'épuration », conclut le biochimiste Michael Hengartner dans un article. L’engagement des communautés et municipalités a ainsi permis un processus de purification sur le long terme, qui permet aujourd’hui aux habitants de se baigner en face de chez eux. 

A Paris, la baignade pour tous ? 

Le succès de nos voisins est-il applicable à notre capitale ? Oui et non, semble-t-il. La mairie de Paris et l’Etat promettent un budget dépassant les 1,4 milliard d’euros pour ce projet. Mais comment comptent-ils dépolluer la Seine ? 

La mairie de Paris met actuellement sur pied deux unités de désinfection des stations d’épuration avec le SIAAP (Service public de l’assainissement francilien) qui aura à charge une grande partie du travail de désinfection des bactéries des eaux usées ou mal traitées. De nombreux axes de travail sont pris en compte : « Le raccordement des bateaux au réseau d'assainissement avec une réglementation, la désinfection des rejets des stations d'épuration ; une mise en conformité des mauvais branchements ; une amélioration du réseau d'assainissement et enfin, l'imperméabilisation des sols », expliquait la microbiologiste Françoise Lucas à France Culture

Un travail titanesque - ce sont près de 35 000 foyers avec des branchements en eau défaillants qu’il faut améliorer - qui devrait permettre, espère la mairie, de supprimer l’essentiel des bactéries (fécales, en particulier) de la Seine pour les Jeux Olympiques. Et après ? 

Des piscines dans les villes et des questions écologiques 

Et après, les Parisiens pourront-ils se baigner en ville ? C’est encore difficile à dire. Car maintenir sur le long terme une Seine baignable requiert des moyens colossaux. Les orages constituent notamment un problème d’ampleur : en cas de forte pluie, quand les égouts débordent, les eaux “sales” sont actuellement déversées dans la Seine. Réponse de la mairie : la construction d’un grand bassin de stockage sous la gare d'Austerlitz. « Avec ces moyens, on aurait pu imaginer des mesures plus vertueuses. Comme une politique ambitieuse d’infiltration des eaux de pluie dans les sols, en désimperméabilisant, en multipliant des toitures végétalisées », soulignait au magazine Reporterre Jean-Claude Olivia, élu écologiste de Bagnolet en Seine-Saint-Denis. 

Conséquence : il est peu probable que la Seine devienne la nouvelle Limmat - le fleuve qui traverse Zurich, la ville la plus peuplée de Suisse. La mairie de Paris explique donc qu’elle mettra en place plusieurs sites de baignades dans la capitale, à la manière de la baignade dans le bassin de La Villette. Cinq sont actuellement à l’étude : deux sur les bords du Parc Rives de Seine (Paris Centre), un sur le bras Marie (Paris Centre), un au port de Bercy (12e), et un sur l'Allée du Bord-de-l'Eau dans le bois de Boulogne (16e). On espère que les parisiens pourront donc barboter dans l’eau rapidement. 

Auteur : Benjamin B

Crédit Photo : Creative commons

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