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Contre la sécheresse, Toulouse expérimente la recharge artificielle des nappes phréatiques

Publié le 19 juin 2023 à 22h00

Robinet d'eau dans un champ
Robinet d'eau dans un champ

Depuis les années 1960, quelques régions de France pratiquent la recharge artificielle des nappes phréatiques. Encore peu connue en Europe, cette technique est pourtant très prisée dans les régions soumises à de fortes sécheresses. Avec le réchauffement climatique, cette technique est donc remise sur la table pour pallier la sécheresse qui persiste.

Le saviez-vous ? L’ensemble des nappes phréatiques forment le plus grand réservoir d’eau du monde. En France métropolitaine, l’eau provenant de ces nappes représente presque 70 % de la consommation d’eau potable et les deux tiers de l’utilisation d’eau dans le milieu agricole. Les nappes phréatiques sont donc très importantes pour le quotidien et l’activité des Français. Alors quand elles s’assèchent, cela devient un problème pour tout le monde. Pour essayer de pallier l’assèchement des sols, et par conséquent des nappes, de nombreux projets se mettent en place pour les remplir artificiellement. Avant toute chose, il faut comprendre comment elles fonctionnent naturellement. Alors ressortons nos cahiers d’école et revoyons rapidement le cycle de l’eau.

C’est quoi une nappe phréatique ?

Ce n’est un secret pour personne, le cycle de l’eau contient trois étapes majeures : l’évaporation, la condensation et le ruissellement. C’est lors du ruissellement que l’eau va connaître deux chemins : l’évaporation ou l’infiltration. C’est l’infiltration qui va nous intéresser ici pour la mise en place d’une nappe phréatique. En effet, celle-ci se recharge principalement en hiver, cette période étant plus propice aux pluies. Si une partie de l’eau sert aux plantes, une autre partie s’infiltre dans les fissures et zones poreuses du sol. Elle coule ainsi jusqu’à rencontrer une zone imperméable qui met fin à sa chute pour ensuite s’accumuler et former cette fameuse nappe phréatique. Le niveau de ces nappes est variable en fonction des pluies. Toutefois, en période de sécheresse, les nappes ne se remplissent pas aussi bien. Fabienne Trolard, géochimiste et minéralogiste, explique à TV5 Monde qu’un sol asséché devient hydrophobe ce qui rend l’absorption plus complexe mais pas impossible.

Recharger les sols…

La recharge artificielle des nappes phréatiques est déjà fréquente dans certaines régions du monde comme la Californie ou l’Australie, régulièrement soumises à de longues périodes de sécheresse. En Europe en revanche, le climat n’est pas le même : c’est pourquoi la recharge artificielle ne s’est pas autant démocratisée. Cependant, quand les rapports mensuels du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) montrent que le niveau des nappes n'est pas suffisant pour l’activité humaine, l’approche artificielle devient une éventualité. Bien que déjà expérimentée depuis les années 1960 à Dunkerque et dans les Yvelines pour assurer une eau potable aux habitants face aux nappes surexploitées et polluées, d’autres régions métropolitaines se lancent dans ce processus de recharge comme le département de la Haute-Garonne.

Mais puisqu’il faut que l’eau s’infiltre dans le sol, comment faire lorsque celui-ci devient progressivement hydrophobe ? Au Pecq, dans les Yvelines, l’eau est prélevée dans la Seine puis traitée et filtrée dans des bassins pour rejoindre de plus grands bassins à partir desquels l’eau va s’infiltrer dans la nappe phréatique. Un usage qui fonctionne depuis plusieurs décennies maintenant et que la Haute-Garonne va quelque peu copier. En effet, à partir de l’hiver 2024, des canaux pourtant abandonnés vont être remis sur pied et reliés au canal Saint-Martory pour remplir la nappe présente sous la Garonne.

…une technique viable ?

Si la recharge artificielle n’est pas nouvelle en France, l’expérimentation de la Haute-Garonne est, elle, unique en Europe. Elle serait une des plus grande recharge mais, surtout, elle répondrait à une problématique plus globale. Quand la recharge artificielle des Yvelines vient en appui d’un problème d’eau potable, celle de la Haute-Garonne essaie d’aider l’étiage de la Garonne pour les périodes estivales. Une initiative qui reste en expérimentation puisque trop de questions comme la qualité et la quantité d’eau rendue restent encore sans réponse. Toutefois, si l’expérimentation porte ses fruits, alors peut-être qu’elle sera une des solutions pour lutter contre les effets du réchauffement climatique.

Cette solution n’est cependant pas miraculeuse et doit être étudiée en profondeur par le BRGM avant d’être mise en place pour s’assurer que tous les éléments soient en adéquation avec le projet, car la recharge artificielle ne peut être transposable à toutes les nappes. D’autre part, cette solution ne doit pas être utilisée de manière illimitée et sans modération. Même si la recharge des nappes peut être une source d’économie, selon un rapport de l’UNESCO, ses effets peuvent être néfastes pour le cycle de l’eau puisqu’une fois sous terre, l’eau est bloquée et ne peut être évaporée, c’est pourquoi il est préférable de privilégier l’économie et la sobriété.

Autrice : Flavie R

Crédit Photo : rvimages

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