# Économie

En période de crise(s), le train revit un nouvel âge d’or en Europe

Publié le 29 octobre 2023 à 23h00

Jeune femme regardant le paysage défiler à bord d'un train
Jeune femme regardant le paysage défiler à bord d'un train

L’Europe et le train partagent une histoire unique qui remonte à plus d'un siècle. L'essor du chemin de fer a joué un rôle essentiel dans la formation de l'Europe moderne en favorisant la mobilité, le commerce, et les échanges culturels. Face aux enjeux actuels, le train mise sur l’innovation pour séduire tout un continent. 

L'Europe est actuellement témoin d'une transformation significative de ses voyages en train, avec une multiplication d'initiatives ferroviaires innovantes. Les trains transfrontaliers sont de plus en plus appréciés pour leur accessibilité, leur praticité (en offrant surtout des liaisons directes vers les centres-villes) et leur durabilité. Pour preuve, 8,2 milliards de passagers ont utilisé les lignes ferroviaires européennes en 2019, suggérant un renouveau spectaculaire du rail international dans toute sa splendeur.

Cet engouement pour les voyages en train en Europe est le reflet d'une évolution majeure dans la manière dont les Européens appréhendent leur continent. Les avantages du train, tels que la mobilité accrue, la facilité d'accès aux destinations et le respect de l'environnement sont autant de facteurs qui favorisent cette transformation. De plus, les réseaux ferroviaires modernes et l'essor de liaisons internationales mettent à portée de main des expériences de voyage variées, offrant la possibilité de découvrir l'Europe de manière immersive. Le rail international, en tant que pilier de la connectivité européenne, connaît une renaissance bien méritée, offrant aux voyageurs une façon nouvelle et enrichissante d'explorer ce continent riche en diversité culturelle et géographique. Traverser l’Europe en train plutôt qu’en avion n’a jamais été aussi facile. 

Refonte globale pour un réseau collaboratif

Ce n’est pas nouveau : les trains sont considérés comme le mode de transport le plus écologique pour les déplacements à longue distance, responsables de seulement 0,4 % des émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne en 2019. Dans cette optique, l'Union européenne encourage le développement de lignes ferroviaires transfrontalières conformément à sa stratégie pour une mobilité durable et intelligente présentée en 2020. Cette stratégie vise à doubler le trafic des trains à grande vitesse d'ici 2030 pour contribuer aux objectifs du Pacte vert pour l'Europe en vue de la neutralité climatique d'ici 2050. 

On pense notamment au projet « Green Speed », lancé en 2019, dont l’objectif est de créer le plus vaste réseau de grande vitesse en Europe de l'Ouest, tout en proposant une alternative écologique au transport aérien. Cette initiative souhaite connecter des régions emblématiques, de la Tamise aux rivages méditerranéens, et de la mer du Nord à l’Atlantique. Cela implique notamment la relance des trains de nuit pour une transition plus écologique et toujours plus internationale. La compagnie autrichienne ÖBB, avec ses Nightjet, est pionnière en la matière, mettant l'accent sur une alternative pratique et respectueuse de l'environnement. Parallèlement à ce renouveau des trains de nuit, Eurostar et Thalys ont fusionné depuis début octobre. Les deux géants du secteur à grande vitesse s'unissent pour former une entité puissante, visant à redéfinir le transport ferroviaire transfrontalier en Europe. Cette fusion est le reflet d'une Europe toujours plus intégrée, où les voyages sans frontière deviennent la norme plutôt que l'exception.

Néanmoins, cette refonte du transport à l’échelle européenne présente son lot de défis. La coordination des différents réseaux, la gestion des ressources, l'intégration des technologies et la transition des clients vers la nouvelle entité nécessitent une planification et une exécution minutieuses. Bien que l'UE réglemente les transports ferroviaires et favorise la coopération entre ses États membres, le rythme de développement des lignes de train reste la compétence des pays. Le prix, pour les passagers, en est une autre : alors que le coût des billets de train fait parfois débat, l’utilisation de sites de comparaisons de tarifs, de cartes de réduction ou de programmes de fidélité sera sans doute une nécessité pour traverser le continent en train sans vider son porte-monnaie. 

« Avec Eurostar, nos clients ont maintenant une Europe élargie à portée de train. »

Remplacer l’avion par le train ?

Mais malgré les défis, les ambitions sont bien là. La fusion d’Eurostar et Thalys augure celle d’une vision bien plus grande : transporter 30 millions de passagers par an d'ici 2030 entre Londres, Paris, Cologne, Amsterdam et Bruxelles. Et pourquoi pas remplacer l’avion en Europe. Gwendoline Cazenave, CEO d’Eurostar, décrit cette fusion comme un tournant historique pour le transport ferroviaire à grande vitesse en Europe. « Avec Eurostar, nos clients ont maintenant une Europe élargie à portée de train », explique-t-elle dans le QG londonien du groupe. « Il s’agit d’aller plus loin pour les clients en proposant plus de destinations, plus de services, plus de connexions intermodales mais surtout plus de voyages durables. C’est notre rôle. »

Avec une flotte de 51 trains desservant 28 destinations dans cinq pays, Eurostar veut s’aligner sur le réseau domestique de chaque pays et leurs offres, afin de « ne plus être un opérateur mais un connecteur ». Ainsi, Lille deviendra un hub clé pour les destinations alpines en hiver, tandis que des accords se forment avec les opérateurs aériens belges pour créer plus d’intermodalités et faire du train une évidence. De plus, les européens ne sont pas les seuls concernés. Avec une augmentation du trafic de 18 % cet été des usagers « overseas » (hors UE) qui arrivent en Europe et voyagent en avion, Eurostar souhaite les rediriger vers le train et qu’il n’y ait plus d’avions sur ce réseau. La réintroduction et l'expansion des services de trains ne sont pas seulement une réponse à la demande croissante pour des alternatives de voyages plus verts, c’est aussi le signe que le secteur a pris la mesure des changements en cours. 

Avec Nightjet qui prévoit de déployer des rames de nouvelle génération, principalement sur ses liaisons vers l'Italie, les passagers peuvent s'attendre à des expériences de voyage améliorées, combinant luxe et durabilité. Ces évolutions s'accompagnent d'une anticipation grandissante autour de liaisons futures, telles que Paris-Berlin en décembre 2023 et Barcelone-Zurich via Lyon en 2024. Ces nouvelles routes promettent d'offrir encore plus d'options de voyage à travers le continent, renforçant le réseau ferroviaire européen. La collaboration entre les pays et leurs différentes compagnies est primordiale afin de créer une offre solide et cohérente, toujours innovante et continuer de faire rêver les voyageurs. A quand la vue sous-marine dans le tunnel sous la Manche ? 

Autrice : Carla P

Crédit Photo : AleksandarNakic

Partager