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Bio Inspir : comment décontaminer les sols grâce aux mauvaises herbes

Publié le 28 décembre 2022 à 23h00

Échantillage d’eau et test d’analyse de pureté dans un cours d'eau
Échantillage d’eau et test d’analyse de pureté dans un cours d'eau

Et si on détournait les mauvaises herbes pour dépolluer les sols ? C’est le pari de Claude Grison et de son équipe, qui ont lancé la start-up « Bio Inspir ». La chercheuse du CNRS vient de recevoir le prix de l’inventeur européen de l’année pour son filtre végétal catalyseur. 

Renouée du Japon, laitue d’eau, et bien d’autres mauvaises herbes encore ont envahi nos cours d’eau jusqu’à saturation, si bien qu’il est devenu quasiment impossible de s’en débarrasser. Une solution a peut-être été trouvée par la start-up de la chimiste ​Claude Grison du laboratoire Chimie Bio Inspirée du CNRS : ces plantes parasites pourraient être récoltées puis utilisées en filtres dépolluants pour les eaux usées industrielles. Un nouveau procédé 100% naturel pour purifier ces effluents qui subissent encore l’influence de polluants industriels utilisés il y a des décennies comme l’arsenic ou le plomb.

Les mauvaises herbes deviennent des solutions écologiques

Née dans le laboratoire ChimEco de l'université de Montpellier en 2020, Bio Inspir part du principe qu’il est possible de transformer les plantes aquatiques exotiques trop abondantes en des sortes d’éponges à métaux lourds. Des filtres végétaux pourraient donc, en plus de décontaminer les sols et les eaux usées, être utilisés comme catalyseurs biosourcés et non toxiques pour les industries, notamment pharmaceutique et cosmétique. Un processus doublement écologique puisque si ces plantes ne sont pas transformées, elles sont grandement toxiques pour l’environnement et parasitent la biodiversité. En les valorisant, BioInspir transforme une menace en « un outil pour la synthèse de molécules bioinspirées et respectueuses de l’environnement ». 

Dans un contexte de crise environnementale majeure, ce système inédit est entièrement écologique et durable. Ces filtres végétaux sont créés à partir de poudre de plantes qui captent les métaux lourds présents dans les effluents industriels. Grâce à ce procédé, ils sont récupérés pour être réutilisés dans les industries en les transformant en éco-catalyseurs, plus efficaces que ceux en chimie traditionnelle. Une telle technologie pourrait donc avoir un impact colossal sur la préservation des ressources en eau, à la fois qualitative et quantitative. Le système de Bio Inspir a d’ores et déjà permis la valorisation de six espèces végétales différentes adaptées à un polluant en particulier et la production de 60 biomolécules à haute valeur ajoutée.

Une filière aspirante et inspirante

Plus besoin de produits pétrochimiques ! Cette technique pourrait potentiellement permettre aux différentes industries de ne plus dépendre de l’extraction minière. Puisque les racines et les feuilles de ces plantes peuvent capturer n’importe quel métal lourd selon l’espèce utilisée, cela signifierait une forte réduction des coûts énergétiques liés à l’extraction et à la transformation, très énergivore, de ces métaux en catalyseurs. S’inspirant de la nature et des plantes, Bio Inspir a été récompensé du prix de l'inventeur européen de l'année 2022 dans la catégorie recherche en juin dernier, par l'Office européen des brevets. Une récompense prestigieuse qui pourrait inciter plus d’un chercheur à œuvrer pour une chimie plus responsable et citoyenne.  

Autrice : Carla P

Crédit Photo : Brian A. Jackson

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