Par un matin glacial de novembre à Paris, où la neige recouvre la ville, un camion intriguant attire les regards près de l'Hôtel de Ville. Arborant l’image d’un homme perdu dans un désert et l’inscription « Oserez-vous tester la vie à 50°C ? », il abrite une expérience immersive organisée par le Human Adaptation Institute, fondé par l’explorateur Christian Clot. Cette initiative, intitulée Climate Sense, invite le public à vivre 30 minutes dans des conditions climatiques extrêmes pour sensibiliser aux impacts du réchauffement climatique.

Le choix de Paris pour cette étape est symbolique : la capitale, dont la température a déjà grimpé de 2,3°C par rapport à l’ère préindustrielle, connaît des records inquiétants, comme les 42°C atteints en juillet 2019. Avec l’intensification des vagues de chaleur, vivre sous 50°C pourrait devenir une réalité pour de nombreuses villes dans les décennies à venir.

La chaleur, un défi pour le quotidien

L’expérience commence dès l’entrée dans le camion, où un sas marque la transition brutale entre le froid extérieur et une chaleur suffocante évoquant un sauna. L’air brûlant enveloppe immédiatement les participants, poussés à se dévêtir pour tenter de supporter cette atmosphère oppressante. La première activité simule un trajet quotidien. Sur un tapis de course, marcher à une vitesse modérée devient une épreuve redoutable. En quelques minutes, la transpiration coule à flots, la respiration s’accélère et la fatigue s’installe. Amélie, une participante, résume son ressenti : « Même aller chercher le pain deviendrait un défi ! ». 

Au-delà des défis physiques, la chaleur affecte également les capacités cognitives. Lors du deuxième atelier, des jeux d’adresse, pourtant simples en temps normal, deviennent insurmontables. Impossible de se concentrer ou de mobiliser sa dextérité. Les participants, accablés, peinent à suivre les consignes et se sentent rapidement irritables et apathiques. L’expérience culmine avec un test de logique. En répondant à des questions complexes sous la pression de la chaleur, les participants constatent à quel point leur réflexion est ralentie. Amélie, fatiguée et irritable, remarque : « À 50°C, même les interactions sociales semblent impossibles ! ». La chaleur exacerbe les tensions, rendant toute communication plus difficile et amplifiant l’isolement.

Des effets profonds sur le corps et l’esprit

Une vidéo explicative clôt l’expérience en décrivant les impacts prolongés de la chaleur sur le corps humain. Mélusine Mallender, aventurière et cofondatrice du Human Adaptation Institute, explique que même une courte exposition entraîne des réactions physiques intenses. Sur le long terme, ces conditions épuiseraient les organismes, augmentant les risques de dysfonctionnements graves.

Elle souligne également les effets cognitifs et sociaux de la chaleur. « Chaque fraction de degré supplémentaire accroît la pression sur notre cerveau, réduisant nos capacités et accentuant les conflits sociaux », précise-t-elle. En Europe, les vagues de chaleur amplifient même les inégalités, notamment entre les sexes.

Une expérience pour éveiller les consciences

L’objectif de Climate Sense va au-delà de la simple démonstration. Pour Christian Clot, sensibiliser au changement climatique passe par l’expérience physique, car « c’est une sensation, et non une information, qui incite réellement à changer de comportement ». Selon lui, plus de 70 % des participants repartent avec une nouvelle prise de conscience.

Christian Clot ambitionne désormais de déployer cette expérience dans divers contextes – écoles, entreprises, institutions – pour toucher un public toujours plus large. Actuellement autofinancé, le projet cherche des partenaires pour poursuivre son expansion et encourager des actions concrètes face aux défis climatiques.

Autrice : Carla P

Crédit photo : fizkes / iStock